Une vie faite de rencontres :
Sabine Weber est née en 1924 à Saint-Gingolph en Suisse, sur les bords paisibles du Lac Léman. C’est à 12 ans, alors de passage à Paris, qu’elle achète son premier appareil photo dans un Monoprix avec son argent de poche. De retour en Suisse, première approche, premières photos et premiers tirages également, avec l’aide de son père, chimiste de son état. A 18 ans, elle comprend qu'elle fera son métier de la photographie, elle quitte l’école pour suivre une formation de trois ans, de 1942 à 1945, dans le studio de Frédéric Boissonnas à Genève. En 1945 elle décroche son diplôme de photographie et ouvre un atelier à Genève. Elle vit et travaille à Paris dès 1946, alors qu’elle n'a que 22 ans, en tant qu’assistante du photographe de mode Willy Maywald. Elle devient la photographe indépendante Sabine Weiss en 1950, l’année de son mariage avec le peintre américain Hugh Weiss. En 1952, elle signe un contrat avec Vogue, pour la mode et le reportage, qui prendra fin en 1961. Elle entre à l’agence Rapho en 1953, grâce à Robert Doisneau qui découvre ses photos dans le bureau du directeur de Vogue. Durant les années suivantes elle améliore sa technique et élargie sa culture en fréquentant des maîtres de la photographie comme son ami Jacques Henri Lartigue, des plasticiens proches de son mari ou des artistes comme Jean Cocteau et Maurice Utrillo. Elle obtient la consécration en 1955, quand Edward Steichen sélectionne quelques-uns de ses clichés pour l’exposition devenue désormais mythique : « Family of Man ».
Son approche humaniste :
Depuis elle sillonne le monde et partage son temps entre des commandes pour la publicité et la presse (Time, Life, Newsweek, Town and Country, Holiday, Paris-Match, etc.). Mais, ce qui importe le plus à ses yeux c'est son travail personnel. Sans lieu ni but, il montre la vie et les gens. L’artiste revendique son amour profond des gens par la pratique d’une photographie sans anecdote ni artifice, refusant l’événementiel au profit d’une expérience de la durée avec le modèle. Pour elle, le détail exprime l’ensemble d’ailleurs elle résume très bien sa conception de la photographie dans cette phrase : « Apprendre à voir les détails les plus simples. Le menu détail qui exprime l'essentiel. Le petit geste qui exprime le mouvement. Le fléchissement du doigt qui suggère l'état d'âme. L'expression de l'individu qui parle de la foule. L'infiniment petit qui raconte le grand. Le regard de l'autre qui dit son angoisse et sa joie. » Ses compositions sont savamment choisies, soutenues par une modulation très contrastée de la lumière variant du noir profond au blanc pur. Dans son approche relationnelle avec ses sujets, chaque prise de vue est précédée d’un temps d’échange, préalable nécessaire à tout arrêt sur image respectueux : père de famille jouant avec son enfant, gamin du Paris populaire, immigré accueilli par France terre d’asile, femme âgée, mendiant... Quelque soit la situation elle fige avec dignité et parfois avec humour se qui se dégage de ces rencontres, elle a su capter l'ambiance particulière de l’après-guerre. Au-delà même de l’aspect esthétique de son œuvre, elle a contribué à élargir les horizons et les points de vue sur les réalités de l’époque, d’où son rattachement en terme de classification au courant des photographes humanistes. Ce besoin d’authenticité se retrouve à travers le choix de ses témoignages, de ses sujets. Qu’il s’agisse de mode, de portraits de stars, de photo-journalisme ou de clichés personnels, l’individu occupe toujours une place centrale. L’ambiance qui se dégage de ses photos en noir et blanc est envoûtante. Sabine Weiss a fait de la photographie un art de vivre, créer peut-être, mais avant tout, témoigner. Témoigner du quotidien des hommes, de la solitude, de la joie, des croyances, de l'enfance … Le photo-journalisme lui a permis de parcourir le monde, elle voyage au Portugal, en Grèce, en Égypte et en Inde. 50 années à sillonner l'ensemble de l'Europe, de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amérique. Cependant sa vision est toujours restée la même, s’attachant à montrer l’humain au sein de son environnement. Parmi les thèmes qui lui sont chers on peut citer : Les hommes et leurs croyances, les gens des villes et des campagnes, la rue, les scènes de vie prises sur le vif et plus particulièrement les photos d’enfants, toujours simples et spontanées.
Ses réalisations :
Sabine interrompt sa quête personnelle en 1967 à l’arrivée de sa fille adoptive, avant de reprendre dans les années 70, avec le succès qu’on lui connaît. Sabine Weiss a été faite Chevalier des Arts et Lettres en 1987, et Officier des Arts et Lettres en 1999. Son travail elle l'a présenté dans de nombreux musées à travers le monde. Ses photos font partie de collections prestigieuses (Musée National d'Art Moderne à Paris, MOMA, Metropolitan Museum of Art, Art Institute de Chicago, musée de l'Elysée à Lausanne, centre Georges-Pompidou, Maison européenne de la photographie, Kunsthaus Zurich, musée Folkwang à Essen, Muséum of Modern Art de Kyoto, etc.). Auteur de plus d'une quinzaine d'ouvrages, elle reste une personnalité discrète peu connue du grand public, malgré la vente d'une de ses photographies intitulée " La sortie du métro " adjugée 11 500 dans une vente aux enchères en 2005. Son personnage est à l’image de ses clichés, à ce propos elle dit : « Mes photos ont une certaine qualité qui n'est que le reflet de moi-même dans mes rapports avec les gens. Une certaine tendresse pour les êtres, pour leur solitude ou leurs émotions retenues. Elles expriment un certain amour que j'ai pour la vie ». Une autre phrase reflète bien sa personnalité : « Je n'aime pas les choses très éclatantes mais plutôt la sobriété… il ne s'agit pas d'aimer bien, il faut être ému. L'amour des gens, c'est beau. C'est grave, il y a une profondeur terrible. Il faut dépasser l'anecdote, dégager le calice, le recueillement. Je photographie pour conserver l'éphémère, fixer le hasard, garder en image ce qui va disparaître : gestes, attitudes, objets qui sont des témoignages de notre passage. L'appareil les ramasse, les fige au moment même où ils disparaissent. » En 2009 alors âgée de 85 ans Sabine Weiss continuait à parcourir le monde tout en intégrant les nouveaux équipements numériques à son sac photo. Cette année là, elle est partie durant trois semaines en Chine, pour prendre des photos avec un petit Lumix de chez Panasonic !
Voici le site de Sabine que je vous conseille de visiter pour en apprendre encore plus sur son travail et découvrir ses photographies bien sûr : http://sabineweissphotographe.com/