Le photographe serbe Boza Ivanovic a grandi à Belgrade. Il travaille d'abord comme assistant de tournage pour une chaine de télévision nationale avant de partir pour Los Angeles en 1996. Là-bas, il travaille comme photographe free lance pour des magazines, des journaux, des agences, et diverses organisations de l'industrie du divertissement.
Après un violent accident de moto qui lui occasionne deux côtes cassées et deux vertèbres fêlées, l’une dans le dos et l’autre au niveau du cou, il a l'obligation de rester immobile durant quatre mois. Un mal pour un bien puisqu’il met à profit ce temps de repos pour réfléchir à la direction que doit prendre sa carrière de photographe. Il se rappelle alors de la photo d’un tigre qu’il avait prise quelques années plus tôt lors d'un shooting dans un zoo. Il déclare avoir été frappé parce que le tigre donnait l’impression de bondir littéralement en dehors du cliché, cette image avait une personnalité et une âme. Boza Ivanovic écrira à propos de cette image dans l'introduction de sa première monographie, « Out of the Wild : Zoo Portraits » : « C’était l'essence de l'esprit de cette créature, capturée seulement à travers le mouvement et la lumière. » Il lui était aussi apparu à cette occasion, que ce que l'objectif avait réussi à saisir s'exprimait bien mieux en noir et blanc qu’en couleur. Après sa convalescence, il va donc mettre en application le résultat de cette longue réflexion. Boza va se mettre à prendre des animaux exclusivement en noir et blanc. Pour cela il va visiter 63 zoos en 9 ans pour réaliser le projet « Zoo Portraits ». Comme l’a fait le photographe allemand Wolf Ademeit que je vous ai déjà présenté, dans cette série, Boza nous montre une toute autre facette de ces animaux et réussit, via ces portraits de zoo, à nous faire oublier la captivité de ces animaux le temps d’un instant. Pourtant il va prendre ces portraits d'animaux derrière des barreaux, derrière des vitres, mais leur condition de captivité y est invisible, ne laissant voir que l'image d'une vie anonyme, inconnue, préservée pour la satisfaction du regard. Les animaux qu’Ivanovic a capturés avec son appareil vivent tous en captivité et chaque photographie reflète leur singularité. Pour arriver à faire ressortir les traits sauvages de ces animaux captifs, il a fallu de nombreuses heures d’attente devant chaque cage pour avoir le cliché parfait.
Les Zoos travaillent pour préserver la nature, concourent à la protection des animaux en les protégeant notamment de la présence humaine qui empiète sur leurs environnements. Cages de verre, barreaux et enclos sont autant d’obstacles qui existent pour protéger les animaux amis aussi les visiteurs. Boza Ivanovic transforme astucieusement cette dynamique dans son dernier livre, « Out of the Wild : Zoo Portraits ». Ses photographies amènent le spectateur à passer outre ces barrières et réintroduisent même le sentiment de crainte et de peur. Effectivement ces animaux « sauvages » apparaissent comme ils le feraient en pleine nature. Les images inspirent une tension car ces animaux d'une beauté envoûtante sont parfois terrifiants. Ils percent l'obscurité et dévoilent leur majesté en révélant leur esprit sauvage. Ils surgissent de ce fond noir très noir et sont ainsi au contact du spectateur qui a l’impression d’être à leur portée sans aucune protection rassurante. Quand on connaît l’histoire de ces portrait, on imagine tout le travail et le temps qu’il a fallu afin d’isoler l’animal dans son environnement artificiel pour lui redonner son caractère sauvage. Surtout si l’on a à l’esprit que contrairement à ce que l’on pourrait croire, Boza n’a pas utilisé de flash mais s’est appuyé uniquement sur la lumière naturelle en jouant sur l’exposition afin de gommer l’arrière plan de ces compositions.
L’une de ses images les plus médiatisées est celle du lion, nous découvrons sur ce portrait différents traits de caractère assez connus pourtant comme la grandeur, la fierté, l’humilité, la pureté et une certaine honnêteté... Cette expression est à couper le souffle, et c’est sûrement en raison de la patience et de la discipline qu'il a fallu à Ivanovic pour réussir ce cliché. Pendant quatre jours, il a attendu devant la cage du lion au zoo de Los Angeles. Quatre jours, de neuf heures du matin jusqu'à cinq heures du soir, à regarder ce lion assoupi. Le fauve dormait, indifférent à la présence du photographe, celui-ci à l'affût, et présentant indirectement des signes de déférence au roi de la savane. Au moment où il s'éveilla, Ivanovic était là pour figer l’instant et se souvient : « C'était beau et impressionnant, et en même temps, très paisible. Il était devenu rapidement clair que chaque animal avait sa propre personnalité. Ce lion semble-t-il très fier pouvait tout à fait se montrer un animal très doux... Il fallait des heures d'observation pour apprendre à connaître chacune de ces créatures. » La photographie du lion a connu un franc succès puisqu'elle a servi de modèle pour des tatouages, et est apparue sur Instagram en montrant différentes parties du corps ornées de têtes de lions détaillées : des épaules, des poitrines, des abdomens, des dos, des biceps, des avant-bras, des mains, des cuisses et des mollets. Partout ce lion trouvait sa place.
Ivanovic va prendre des photographies partout dans le monde : En Afrique du Sud, en Tanzanie, au Kenya, au Mexique, en Serbie, en Macédoine, en Croatie, au Canada et aux États-Unis. Ses travaux vont paraître dans des magazines tels que National Geographic, Esquire, powerHouse Magazine, ressources, Insider, Press-Telegram ou le Washington Post…
Vous pouvez découvrir son site qui présente son travail et quelques portraits de zoos : http://www.bozaivanovic.com/