Charles Moore est né en 1931 à Hackleburg, une ville agricole en Alabama. Son père était pasteur baptiste et libéral progressiste qui parfois prêché dans les églises noires. Comme Charles le rappellera plus tard, il lui interdisait d’utiliser le mot « haine ». Moore a grandi à Tuscumbia, adolescent, il achète son premier appareil photo, un Kodak Brownie. Il sert dans les Marines en tant que photographe avant de s’inscrire comme étudiant à la Brooks Institute of Photography à Santa Barbara, en Californie. De retour à l'Alabama au milieu des années 1950, après l'obtention de son diplôme, il a travaille en tant que photographe et fait principalement des portraits avant de décrocher un emploi sur le Montgomery Advertiser, où il couvre des événements sportifs et les nouvelles locales.
Charles Moore est un célèbre photographe dont les clichés pris dans les zones secouées par la violence et les conflits, ont été distribués par l’agence Black Star à laquelle il était associé. Ses images de violence et d’injustice pendant l’ère des droits civiques ont contribué à mobiliser l'opinion publique des Etats-Unis pour le changement. Photographe indépendant, il était très impliqué dans tout ce qu'il a couvert. Dans toute sa bravoure et sa combativité en tant que photographe, Moore était quelqu’un de calme, d’effacé, c’était un l'homme qui préférait laisser ses photos parler d'elles-mêmes. Contrairement aux autres photographes il n’utilisait pas de longue focale. Il était toujours au cœur de ce qu’il photographiait, au beau milieu de l’action, si bien qu’on le voit très souvent sur les images de ses confrères. En 1958 une photographie va lancer sa réputation, elle forgera sa destinée et va le propulser en première ligne au cœur de la campagne des droits civiques. Le bureau de l'annonceur était à seulement trois pâtés de maisons de l'église baptiste sur Dexter Avenue. Moore entend parler de l’évènement et s’y rend pour photographier le « roi prêcheur ». Il tira un portrait de Martin Luther King sous une immense croix blanche.
Ensuite de 1958 à 1965, Moore a enregistré les drames souvent tumultueux qui ont témoignés de la montée du mouvement des droits civiques dans le sud profond des Etats-Unis. Selon le "Times Daily", Charles Moore a commencé à couvrir le mouvement des droits civiques quand Martin Luther King a été arrêté à Montgomery en 1958. Au cours des années suivantes, le photographe originaire de l'Alabama a pris certains des clichés les plus marquants de cette longue lutte. Natif de cette région, il prenait des clichés que beaucoup d'autres de ces collègues « blancs » considéraient comme étant une trahison envers leur race. D’ailleurs il déclarera à ce sujet : « Pour les gens qui soutenaient vraiment la ségrégation, j'étais le pire ennemi, un garçon du Sud qui travaille contre les racistes. » À l'époque, l'impact médiatique de ses images était immédiat et spectaculaire, Moore semblait soutenir le mouvement.
Charles Moore suit Martin Luther King partout, quand il prêche, prie, marche, et surtout quand il est arrêté sur les marches du palais de justice de Montgomery, le 3 septembre 1958. Moore était le seul photographe présent ce matin-là… Il a continué de photographier quand King a été emmené à la prison locale. De là, Moore a réussi à se positionner derrière le bureau, où il a photographié par-dessus l'épaule des geôliers et a pris l'image inoubliable du Roi, bras attaché derrière le dos, devant son épouse Coretta, regardant la scène avec un quasi détachement, tant le moment était surréaliste. Lorsque la photographie a été publiée, les journalistes de toute l'Amérique ont été envoyés à Montgomery pour couvrir l’évènement. Cette image unique témoigne de la ténacité à témoigner de Moore en tant que journaliste et de sa volonté de se placer, souvent au prix de risques inconsidérés, au centre même de l'action qu'il capturait de manière spectaculaire.Une autre image inoubliable, prise au centre-ville de Montgomery en 1960, a choqué Moore quand il l’a vu développée. Sur cette photographie on voit un homme blanc avec une batte de baseball sur le point de frapper une femme noire. En arrière-plan, un autre blanc fait pleuvoir des coups sur la tête d'une autre femme noire. Parmi les spectateurs blancs on voit un autre homme armé d'une tige de fer, un autre tenant une bouteille, et encore un autre portant une chaîne. Moore a dit plus tard qu'il était hanté par le pouvoir de la photographie qui montre beaucoup plus que l'œil ne peut souvent voir dans la précipitation du moment.
En 1962 Moore a également mémorablement capturé la violence entre les manifestants blancs et les gardes nationaux qui ont assisté à la remise du diplôme de James Meredith comme premier étudiant noir obtenant un diplôme en sciences politiques à l'Université du Mississippi. Un événement qu'il appellera plus tard, un moment vraiment historique. Il était l'un des rares photographes à retourner sur le campus pour photographier Meredith, le seul homme noir en robe d’étudiant perdu dans une longue file d'étudiants blancs !
Plus tard à Birmingham en 1963, lorsque la police use de canons à eau sur les manifestants, il se positionne entre les deux camps, ce qui lui permet de prendre une série d’images intenses qui montre la violence des jets d'eau qui frappent les étudiants et leurs pieds au sol. Toujours en 1963, quand ses images de policiers avec des chiens attaquant des manifestants des droits civiques à Birmingham ont été publiées dans Life, elles ont causé un tollé national. Arthur Schlesinger Jr, historien et alors conseiller de John F Kennedy, a déclaré « Les photographies de Moore ont transformé l'engouement national en une envie de légiférer nécessaire». Il a travaillé la majeure partie de sa carrière pour le magazine Life.
De même, il est présent en 1965 quand la police utilise des gaz lacrymogènes contre les manifestants venus revendiquer pacifiquement leur droit de vote lors d'une marche de Selma à Montgomery, en Alabama… Lorsqu'on l’interrogeait sur ces évènements des années plus tard, il répondit : « Je me suis battu avec mon appareil photo, je préfère un appareil photo comme arme plutôt que de me servir de mes poings toute une journée.»
Moore couvre la guerre du Vietnam et d'autres conflits en Haïti, au Venezuela ou encore en République dominicaine pour le magazine Life. Il propose également ses photos au Saturday Evening Post et au magazine Fortun… Puis, las de violence, il se spécialisera dans la photographie de mode et de nature. En 1989, ses photographies de droits civiques lui ont valu le prix « Kodak cristal Eagle » pour leur impact sur le photojournalisme. En 1991, une collection de ses photographies et sa biographie sont parues sous le titre « Powerful Days : The Civil Rights Photography of Charles Moore » (Jours puissants : les Droits civiques de Charles Moore). En 2002, il a dit : « Je sais l'importance qu’on prête à mon travail, mais je n’y suis pour rien, ce sont les photographies qui ont eu ce pouvoir. Si ces photos ont rendu mon sud natal meilleur... alors je suis sacrément fier. » Charles Moore meurt en 2010 âgé de 79 ans, il aura marqué l’histoire du photojournalisme par ses reportages sur la lutte des noirs américains pour l’obtention de leurs droits civiques.
Charles Moore n’a pas de site à ma a connaissance comme à mon habitude dans ce cas je vous indique un lien qui me parait intéressant : http://www.stevenkasher.com/artists/charles-moore